Havas Media se penche sur les déconnectés
J’ai eu l’occasion, l’autre jour, d’être invité à un petit déjeuner-débat autour de cette étude (voir plus bas) publiée par Havas Media, sur Les Déconnectés. C’est Dominique Delport, PDG de Havas Media France, qui encadrait tout ça, dans la bonne humeur. Nous étions avec quelques autres blogueurs et acteurs de la vie numérique, dont j’ai oublié les noms pour la plupart, désolé. BREF. Pour faire simple, l’étude se penche sur 4 profils identifiés, Les Minitélistes, Les Exclus, Les Flippés, Les Déconnectés 2.0. De deux choses l’une, soit le sujet vous interesse, et je vous invite à lire l’étude ci-dessous, soit vous pouvez passer à autre chose.
Voilà.
Bon, je passe sur la forme, j’ai du mal avec les slideshows, du mal avec les photos moches intégrées aux slideshows, du mal avec les graphiques mal légendés dans les slideshows. Moi j’aime bien lire des études, avec des mots.
Sur le fond, maintenant. J’ai eu l’occasion de le dire l’autre matin, j’ai un peu de mal. Sur deux aspects opposés.
Je ne peux pas m’empêcher d’extraire de tout ça que les déconnectés seraient des victimes, ou même d’imaginer sérieusement que « ne pas avoir accès à Internet » serait un manque. Considérer qu’internet a quelque chose de vital ? Non, surtout pas.
Je n’ai évidement pas étudié le sujet dans les détails, mais voilà comment je comprends et appréhende le phénomène.
Aujourd’hui la plupart des internautes, donc des connectés (ou privilégiés), ne sont pas particulièrement -enrichis- grâce à Internet.
Comme pour tous les outils et supports, c’est le contenu qui prime avant tout. Regardez l’usage d’Internet des jeunes (et pas que) aujourd’hui, ça ne représente en rien une progression ou une amélioration de leur niveau de vie, de leur culture, de leur ouverture d’esprit.
C’est identique pour la télévision, pour la presse, pour ce que vous voulez. Avoir une télévision n’est rien. Passer ses journées devant « Les anges de la téléréalité » n’a rien à voir avec « passer ses journées devant une chaine d’info » ou « passer ses journées devant une chaine de voyages », voir « passer ses journées devant du porno ».
Si on cherche à qualifier les usages des individus, j’insiste, ça doit se faire sur le contenu, et pas sur les outils.
Aujourd’hui, pour un jeune, pour un paysan, pour un pauvre, ne pas avoir accès à Internet, n’est pas forcément synonyme de « être à la ramasse ».
L’individu se construit sur ses choix éditoriaux et intellectuels. Ne pas avoir accès à un outil ne l’empêche en rien de compenser par un autre outil (le livre, la télévision, la presse, les voyages, etc.)
A l’inverse, le cas des hyper-connectés est évoqué. Et là aussi certains y voient un problème.
Il y’a quelques jours, j’ai rencontré une jeune femme qui a tenté de me démontrer par A+B, qu’en passant mes journées à faire du Twitter, et en racontant mon quotidien sur les réseaux sociaux, je gâchais des bouts de ma vie, pire, que je manquais de respect pour mon entourage.
L’utilisation d’un outil par excès est, souvent, considéré comme un problème. Et bien non, là non plus je ne suis pas d’accord. Ca n’est pas le temps passé sur un outil qui compte, mais le contenu que l’on en tire ou que l’on génère.
En passant mes journées sur Twitter, je fabrique une image, je génère du contenu, j’en agrège, je créé quelque chose. Ca me prend 10 heures par jours ? Ok ? Et alors ? Pourquoi préjuger de ces choses là, pourquoi ne pas considérer que la sur-utilisation d’un outil ou d’un media poserait problème ?
Je vais vous donner un exemple plus précis, avec un des Slide du document, qui me rend dingue :
Je vais être clair avec vous, pour moi ce type de raccourci est une vraie connerie, dégoulinante de snobisme et de bêtise.
Qu’est ce qui est considéré là dessus ? Qu’un enfant qui regarde peu la télé, moins de 60 minutes par jour, dessine mieux qu’un enfant qui regarde la TV plus de 3 heures par jour.
ET ALORS BORDEL ? CA PROUVE QUOI BORDEL DE CUL ?
En quoi « savoir bien dessiner » est un critère de bon développement ? Qui est le connard qui a décidé qu’un enfant qui ne sait pas dessiner est mieux développé qu’un autre ?
Je vous propose de faire le même test avec des enfants qui font 3h de Sport au lieu de 3h de TV. Ou mieux encore, des enfants qui lisent des livres, sans images, pendant 3h par jour, au lieu de regarder la TV. Eux aussi dessinent moins bien que les autres, ok, et alors ? Ils sont moins bien développés que les nains qui n’ont que ça à foutre ? Et ne parlons pas de ceux qui font de la musique.
Bref, c’est absolument idiot. Et ça m’agace.
Une fois encore LES OUTILS, que ce soit Internet, le dessin, la télévision, le sport, ON S’EN BRANLE. Ce qui compte c’est le contenu.
Un enfant qui est épanoui en regardant la télévision, qui sera curieux de ce qui se passe dans le monde, via sa télécommande, sera peut être moins con est moins névrosé qu’un gamin frustré à qui on interdit tout loisir médiatique, et qui n’a droit qu’à une boite de fusains pour occuper ses après midi.
Tout ça pour dire quoi ? Que sur-connecté ou déconnecté, à mon sens, on s’en fout comme de l’an 40, ce qui compte c’est la matière que l’on manipule et qu’on ingère, et pas le chemin qu’on prend pour y accéder.
Pour les hyper-connectés la question porterait plus selon moi sur une mono-activité que l’excès d’utilisation d’un truc entraine (puisque 3h sur un écran au lieu d’une, ça fait 2h de moins pour faire autre chose) que sur le type d’outil utilisé. Et ce serait valable pour tout, activité numérique ou physique : si on part du principe qu’un bon développement d’une personne se base sur la diversité des choses auxquelles il a accès et peut faire, toute spécialisation excessive dans un domaine entraine une fermeture au reste (après certaines activités sont plus transversales que d’autres aussi…).
C’est pour ça que je te rejoins sur l’idée du contenu, mais quelqu’un qui passe 3h par jour sur voyageTV, je le pré-juge pas plus ouvert que quelqu’un qui regardera MangaTV, idem pour internet. Il faudrait regarder à côté leurs activités annexes pour en juger.
Mais je vois pas bien en quoi être « mono activité » est un problème en fait. Cette notion de « bon » ou de « mauvais » développement me dépasse un peu.
c’est pas bon ou mauvais en soi, mais ça renvoit à la finalité du développement de l’individu, à savoir sa place dans la société (au sens social). ça doit être l’idée que pour être intégré en société il faut diversifier ses centres d’intérêts et ses capacités, son ouverture d’esprit, etc. pour naviguer entre les différentes strates. Et pour ça, il faut pratiquer différentes choses. Quelqu’un d’hyper balaise dans un domaine mais incapable d’en parler sera mal vu, ou sa qualité sera amoindri. Quelqu’un de pointu en physique, s’il n’a que ce sujet de conversation en tête, sera vu comme ininterressant, et aura une forte chance (risque) d’avoir une vie sociale faible, donc une moindre possibilité d’être heureux. Ce qui, je pense, est le but du développement d’un individu.
Tout a fait d’accord avec toi, peut être qu’Havas non :D.
Mais malheureusement le contenu est de plus en plus « pauvre » pour nous adultes sur la télé. En tout cas dans des horaires corrects. Ce qui a comme conséquence de ne l’allumer que rarement.
Et pour les enfants, j’ai l’impression qu’il existe plein de choses (télé, numérique) qui doivent être pas mal pour l’épanouissement. Ce qu’on n’avait pas il y a 30 ans lors de notre jeunesse a nous et qui est forcément un plus (ou une façon différente de s’informer/s’épanouir/s’amuser).
Mon fils de 9 mois s’amuse a déverrouiller mon téléphone portable. Au lieu de m’alarmer, je trouve ça intéressant et marrant de voir que ca l’amuse. Autant que de tirer les poils du chats ou de se rouler dans l’herbe.
Bref, comme tu le dis, c’est le contenu qui compte.
En vrai je suis pas sur que le contenu soit plus pauvre aujourd’hui, y’a jamais eu autant de choix à la télévision, et sur l’Internet aussi d’ailleurs. Je crois pas trop au « c’était mieux avant » perso.
C’est des choix individuels.
Quand tout Twitter décide de LT L’amour est dans le près, et pas ArteTV, bah ça reste un choix.
Hands up \o/
C’est marrant parce que je me pose régulièrement la question de la connexion / déconnexion. Je suppose que dès qu’on se pose la question on a une partie de la réponse, mais bon.
Je pense que les personnes qui ont rédigé cette étude ne voient le web que par un seul prisme, celui de leur boulot (et de leurs loisirs).
En soi ce n’est pas un souci, sauf quand on veut généraliser à l’ensemble de la population.
Chacun fait ce qu’il veut de son accès à internet. Par exemple, je déteste les gens qui arborent fièrement leur tablette juste pour aller sur Facebook, parce qu’à mon sens, ils ne sont que des spectateurs mous, et ne créent rien. Et ça m’énerve, les gens qui ne créent rien.
Moi je créé sur internet : j’écris quelques lignes, de temps en temps je mets des photos (beaucoup).
Mais je suis inutile et détestable, parce que je suis loin d’être un artiste et ce que je produis n’a aucun intérêt.
Etc., etc.
Il y a une vision très « agence parisienne » qui en ressort, en fait. (Si j’étais vilaine je dirais : une vision bourrée de clichés et de réflexes. C’est pas méchant en soi ; on est tous victimes de notre vision de la chose.)
En fait ça fait étude de blogueurs un peu ce truc.
C’est con, pour Havas Media. (mais bon)
(J’aime les parenthèses)
(Je n’ai rien à dire.)
Ben là où je suis pas d’accord avec toi, c’est sur le fait que ce soit un problème que les gens ne soient que spectateurs.
Un type qui passerait ses journées dans une bibliothèque à lire des bouquins, tu ne le qualifierais pas de « spectateur mou ».
Tu es snob et puis c’est tout :p
(moi aussi j’aime bien)
J’avoue que le racourci regarder la télé = ne rien en foutre est assez facile.
Mais personnellement j’ai tendance à dire que je ne me sens pas plus intelligente ni supérieure aux autres parce que je regarde Arte, qui m’apprend quelques petites choses – mais pas autant que lorsqu’on les vit sans l’intermédiaire d’un écran. (Par contre regarder TF1 me rend clairement plus con)
Mais c’est la même chose pour une bonne partie des gens qui « voyagent » (mais jamais au contact des gens, ou hors des sentiers battus), s’en gargarisent, et au final, n’en font jamais rien bordel. Un peu comme les milliers de parisiens badauds qui se prennent devant le Grand Palais quand y’a une exposition très médiatisée, et qui ne sont là que parce qu’il faut l’être (et dire : Oh j’ai vu cette exposition, elle est mer-vei-lleuse, oh ils y’a des choses vraiment exceptionnelles).
Je considère simplement que lorsqu’on absorbe un savoir, quel que soit le moyen, si on en fait rien – c’est gâché. (et du coup, on ferme sa gueule, si possible)
Le slide qui t’agace au plus haut point est tiré du livre « TV lobotomie » de Michel Desmurget, que je recommande vivement. C’est sûr que c’est plus probant développé en 300 pages bien étayées qu’avec une image extraite hors contexte.
PS: comme tu ne le liras pas, je résume le propos qui est « quel que soit le contenu, plus la dose de télévision est élevée plus les performances des enfants (et des adultes, bien que l’auteur cherche à démontrer que l’impact est proportionnellement plus important sur les enfants) sont en baisse, dans de nombreux domaines ». On est d’accord ou pas, je ne souhaite pas ouvrir le débat, mais je précise que cet ouvrage est construit à partir d’une foultitude d’études indépendantes toutes citées, il ne s’agit pas juste de la lubie d’un type qui n’aime pas la télé.
Et bien peut être que je le lirai, va savoir :).
Cela dit aussi documenté soit-il, je reste dubitatif sur cette notion de « performances » des enfants, en hausse ou en baisse.
D’une manière générale, la notion de performance m’agace de toutes manières (peut être parce que j’en suis victime aussi).
Je veux bien imaginer que l’ouvrage du monsieur est construit et bourré d’études. Et j’espère en effet que ça n’est pas juste une charge gratuite contre la télévision (la couverture n’aide pas).
Ce livre, qui est effectivement bourré de statistiques sérieuses, démontre d’une manière habile le processus de l’abrutissement par trop de tv…On peut s’en passer désormais et tant mieux ! Par contre, ce qui peut paraitre interressant par rapport aux dessins, c’est l’accès à une certaine culture et à l’idée du beau…